Brexit – Boris Johnson « compare l’Europe à Hitler »

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Dans un entretien au Sunday Telegraph, le Maire sortant de Londres fait un parallèle entre la construction européenne et les super-États voulus par Napoléon ou Hitler.

La presse Européenne est en émoi après les déclarations du sulfureux chef de file du camp pro-Brexit, Boris Johnson. Et une fois de plus, on esquive le débat en invoquant des déclarations scandaleuses « qui ne sont pas sans rappeler les heures les plus sombres de notre histoire ».  Point Godwin atteint, la messe est dite.  Fermez le ban.

Ce qu’a dit Boris Johnson

L’ancien Maire de Londres, qui est un fin lettré, soutient que l’histoire de l’Europe, durant les deux derniers millénaires, a été caractérisée par des tentatives récurrentes d’unification sous l’égide d’un unique gouvernement avec l’idée de restaurer « l’âge d’or » de l’empire Romain. Napoléon, Hitler et d’autres ont essayé, et cela s’est terminé de manière tragique. L’UE est une tentative pour réaliser cela par des moyens différents. Mais fondamentalement, ce qui manque, et c’est l’éternel problème, est qu’il n’y a pas de loyauté sous-jacente à l’idée d’Europe.  Il n’existe pas d’autorité que l’on puisse respecter ou comprendre.  C’est la cause d’un immense vide démocratique.

Ce qu’en dit la presse

Du côté francophone, les articles traitant du sujet sont tous basés sur une seule et même dépêche AFP.  Comme souvent, les articles ont été édités, parfois étoffés, et leurs titres sont tous différents.  A la base il s’agit pour les quotidiens de se différencier de la concurrence en proposant des contenus originaux.   Toutefois cela met aussi en lumière des petits arrangements avec la vérité dans le but de discréditer non pas l’idée même du Brexit, mais bien la personne de Boris Johnson en utilisant l’argument ad hitlerum.

A part « Le Monde », l’ensemble de ces titres déforment totalement les propos tenus par Boris Johnson en lui prêtant une comparaison hasardeuse entre l’Union Européenne et Hitler.

Or ce n’était pas du tout le propos, il y a donc une intention manifeste de discréditer l’intéressé par avance, évacuant ainsi le débat sans avoir d’autre argument à présenter.

Comparer le projet paneuropéen d’Adolf Hitler et la construction européenne.  En quoi ce n’est pas si stupide.

Si la comparaison fait sens, c’est d’abord pour des raisons historiques.  Une filiation encombrante que la presse se sera bien gardé de rappeler.

Walter Hallstein était un juriste nazi et promoteur de la « Nouvelle Europe ». souhaitée par Adolf Hitler.  En 1938, il représente le gouvernement nazi pendant les négociations d’État avec l’Italie fasciste concernant la mise en place d’un cadre juridique de la « Nouvelle Europe » ou « Das neue Europa ».

À partir de 1942, il sert comme officier administratif (Ordonnanzoffizier) durant la Seconde Guerre mondiale. Il est fait prisonnier par les Alliés pendant la bataille de Cherbourg et est détenu dans un camp de prisonniers aux États-Unis.  Après la guerre, il sera nommé secrétaire d’État aux affaires étrangères du chancelier Konrad Adenauer (1951) et est considéré comme un des Pères de l’Europe.  Walter Hallstein sera le 1er Président de la Commission Européenne, de 1958 à 1967.

Conclusion

Contrairement à ce que laissent entendre la majorité des articles de presse, Boris Johnson ne fait pas une comparaison entre Hitler et l’Union Européenne, mais fait référence au projet initialement porté par Walter Hallstein, puis recyclé pour nous être resservi comme s’il s’agissait d’une création originale.

Sur la question, je vous recommande chaudement l’excellente vidéo de la conférence que François Asselineau avait donnée à l’ULB le 16 mai 2013.

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Philippe Huysmans

Webmaster du Vilain Petit Canard, citoyen de nationalité belge, marié et père de deux enfants. Je vis en Belgique et j’exerce la profession d’Informaticien à Bruxelles. Mes articles