Comment faire sa veille médiatique

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Dans le monde hyper-connecté dans lequel nous vivons, il devient paradoxalement de plus en plus compliqué de réaliser une veille médiatique qui soit à la fois efficace, pour ne rien laisser passer, et surtout qui ne nous prenne pas la journée.

Est-ce dû au fait, comme certains le laissent entendre, qu’il y a pléthore de sites d’informations alternatives, que ceux-ci ne publient que peu d’articles originaux et que cela implique d’en parcourir des dizaines dans l’espoir de tomber sur la perle rare ?

J’ai personnellement un doute là-dessus, et je crois pour ma part que le premier responsable, c’est l’internaute lui-même, qui identifie Facebook à internet, alors que Facebook n’est qu’une petite application parmi d’autres. Il se trouve qu’elle est chronophage, et dans la plupart des cas, vaine.

Facebook, c’est comme la télé, mais sur internet.

J’ai coutume de dire que Facebook, c’est le portage de la télévision sur internet. Tout comme à la télé, vous ne choisissez pas le programme, et c’est Facebook qui, dans sa grande sagesse, décide de ce qu’il vous jettera à la figure. Vous y êtes en permanence agressé par une multitude de stimuli, ce qui donne la fausse impression que vous avez vu une grande quantité d’informations passer. Mais quelle information ?

Tout d’abord, puisque c’est Facebook qui décide, il aura tendance à ne vous montrer que des publications qui vous agréent : eh oui, il s’agit de profiter au maximum de votre temps de cerveau disponible pour vous faire avaler le plus possible de publicités au cours de la session; et des études ont montré que pour être réceptif aux publicités, vous devez vous sentir bien, en accord avec votre petit monde. Il s’agira donc de ne rien vous montrer qui soit susceptible de vous contrarier, dans toute la mesure du possible. C’est ce que l’on appelle la bulle de filtre. Une zone de confort artificiellement créée autour de votre avatar dans le réseau social.

Du coup, vous avez peu de chances de tomber sur des articles qui seraient radicalement à l’opposé de vos convictions idéologiques, par exemple. Ou religieuses. Tous les sujets clivants, en fait. Je crois que beaucoup d’entre vous tomberaient de leur chaise s’ils devaient voir, côte-à-côte, leur propre fil et celui d’un utilisateur évoluant dans un environnement culturel totalement différent. Il faut comprendre que ce que vous y voyez n’est pas le reflet de l’actualité, ou de l’air du temps, mais seulement celui que Facebook a choisi de vous montrer pour vous garder dans un cocon douillet et rassurant.

Il convient donc d’en revenir aux fondamentaux, et aller chercher l’information brute là où elle est produite, sur base de vos propres choix. Est-ce que cela peut-être fait sur base semi-automatisée, efficiente et rapide ? Oui, nous allons voir comment.

Les flux Rss

Tout le monde a déjà vu au moins une fois le logo associé aux flux Rss, mais peu de gens savent ce que c’est, et il s’en trouve encore moins pour l’utiliser. Le Rss, qui signifie Rich Site Summary, est un format de données utilisé pour la syndication de contenu Web. Bon, alors disons que ce n’est pas trop parlant, comme ça, mais l’idée, c’est que lorsqu’un flux est disponible sur un site d’informations ou un blog, cela permet de récupérer les titres, les chapos, voire même quelquefois les contenus complets sans avoir à passer par la case navigation.

Il est ainsi possible, avec l’outil ad-hoc, de récupérer automatiquement l’ensemble des flux que vous avez préalablement sélectionnés et rangés par catégories, et de maintenir une liste dans laquelle les nouveaux articles et ceux que vous n’avez pas encore lus apparaissent en gras, un peu comme dans un client e-mail.

Le format Rss est un peu tombé en désuétude, tout d’abord parce que la presse mainstream ne l’a jamais vraiment soutenu : eh oui, ils ne sont pas trop intéressés à ce que vous puissiez voir les titres et les chapo sans avoir à mettre un pied sur leur site, et vous manger les pubs qui vont bien avec. Il convient de se rappeler que pour les médias mainstream, les articles coûtent de l’argent tandis que les publicités en rapportent. Devinez sur quoi ils mettront l’accent ?

Néanmoins, l’immense majorité des sites de presse mainstream, et bien sûr l’ensemble des sites alternatifs présentent toujours cette option, et nous allons voir à présent la manière de l’exploiter au mieux.

Les clients Rss

Appelés aussi agrégateurs de flux, ce sont des logiciels qui permettent d’aller chercher les flux là où ils se trouvent, et de les restituer sous une forme intelligible et claire. Dans ce cas, j’examinerai un programme appelé FeedDemon.

Après l’avoir téléchargé, puis installé, le programme vous demandera si vous souhaitez démarrer avec une sélection de flux présélectionnés, sans aucun flux, ou bien si vous souhaitez importer une liste de flux à partir d’une autre source. Le mieux c’est de démarrer sans flux présélectionnés puisque de toutes façons il s’agira essentiellement de sites américains de peu d’intérêt pour vous.

Par liste de flux, il faut entendre un fichier OPML qui regroupe, dans une structure XML, l’ensemble des flux auxquels vous êtes abonné. C’est un format soutenu par la quasi-totalité des agrégateurs Rss, qui vous permet de changer rapidement de client (logiciel) sans avoir à recréer votre liste de favoris.

À titre d’exemple, je joins ici, sous forme de fichier OPML la liste de mes propres favoris, l’idéal étant bien sûr de vous constituer la vôtre.

Importer une sélection de flux à partir d’un OPML

Dans la barre d’outil située en haut de la fenêtre, cliquer sur le petit triangle sur pointe à droite de Suscribe, puis Import Feeds.

Ensuite, sélectionnez l’option Import an OPML file, indiquez le chemin d’accès au fichier (qui doit être présent sur votre système), puis cliquez sur next.

Cliquez ensuite sur le bouton All pour tout sélectionner… ou faites votre marché ! Puis cliquez sur Next

Puis encore une fois Next, par défaut, il propose de recréer la structure telle qu’elle existait dans le fichier d’origine

Cliquez ensuite sur Finish, et l’opération est terminée. Il va maintenant procéder avec la synchronisation des flux, c’est-à-dire qu’il va aller récupérer tous les contenus à disposition.

Et votre programme aura plus ou moins cette tête-là :

Notez la présence, entre parenthèses et en bleu, de petits compteurs indiquant, pour chaque flux ou chaque catégorie le nombre d’articles non lus, soit ultérieurement, ceux que vous n’aurez pas encore vus, c’est bien pratique.

Par défaut, lorsque vous cliquerez sur le titre d’un article, le programme l’ouvrira dans son propre navigateur, ce qui n’est pas forcément le mieux du point de vue ergonomique.

Vous avez le loisir de changer ceci en cliquant respectivement sur : Tools > Options > FeedDemon Options

Puis, dans l’onglet Reading, sélectionnez « Open external links in default browser instead of FeedDemon »

Cliquez ensuite sur Apply, puis Ok, et le tour est joué.

Comment s’abonner à un flux ?

Rien de plus simple. Imaginons que vous souhaitiez ajouter le blog de Jean-Luc Mélenchon à vos abonnements. Vous commencez par vous rendre sur le site en question, puis vous y cherchez où pourrait se trouver le lien vers les flux Rss. En l’occurrence (et c’est souvent le cas), cela se trouve dans le menu principal, en haut de la page.

Cliquez sur le lien pour l’ouvrir dans un nouvel onglet, puis dans la barre de navigation, copiez l’URL, en l’occurrence http://melenchon.fr/feed/

Ensuite, dans FeedDemon, cliquez sur Suscribe, et magie, il copiera automatiquement le lien qui est toujours dans le presse-papiers dans le champ prévu à cet effet. Faut-il préciser que s’il ne le fait pas de lui-même c’est à vous qu’incombera cette tâche titanesque ?

Ensuite, le programme vous demandera de sélectionner la catégorie dans laquelle vous souhaitez ajouter le flux

Cliquez ensuite sur Finish à l’écran suivant, le flux sera ajouté et il ira chercher immédiatement les contenus disponibles.

Filtres de recherche, la puissance au bout des doigts

Un des points forts de FeedDemon est la possibilité de filtrer, pour une catégorie ou pour l’ensemble, les articles contenant un terme spécifique. Il vous suffit, dans le champ de recherche situé en haut à droite d’introduire un mot, disons « Macron » pour ne sélectionner que les articles parlant de Choupinet.

Et voici ce que ça donne :

Mieux, vous pouvez même introduire ces critères directement dans les propriétés de tel ou tel flux, afin qu’il ne montre que les articles répondant à ceux-ci. Comment ? En cliquant « droite » sur un flux donné. Imaginons que dans le flux du Figaro, vous ne soyez intéressé que par le mot « Macron ».

Cliquez (droit) sur le flux du Figaro, dans la colonne de gauche pour faire apparaître la fenêtre des propriétés, puis sur le [+] pour créer un critère (qui pourra alors être réutilisé ailleurs).

Donnez un nom (facile à retenir) à votre filtre, ajoutez-les termes que vous souhaitez inclure (ou exclure), puis cliquez sur OK (deux fois). Dans ce cas-ci, les articles dont le titre ou la description ne contiendront pas « Macron » seront marqués comme lus dès leur téléchargement, et vous ne les verrez donc pas.

Bien pratique, n’est-ce pas ? À noter qu’on ne peut définir qu’un seul filtre par flux, mais qu’il est possible d’avoir plusieurs fois le même flux pour peu qu’on lui donne un titre différent.

Le mot de la fin

Il vous sera impossible désormais d’invoquer des faux prétextes tels « je n’ai pas le temps » pour justifier que vous ne parvenez plus à vous tenir au courant de l’actu. C’est une question de choix, de méthodes, et de sources. Il faut aller puiser l’information là où elle est créée, sans passer par des âneries comme Facebook dont personne n’a jamais dit qu’il servait à « informer », mais seulement à « favoriser les contacts humains » (et ta soeur ?).

N’hésitez-pas à faire le tour des paramètres pour vous familiariser avec l’interface, afin de pouvoir tirer le meilleur jus de l’application. Nombre d’articles à retenir, durée de rétention, marquage automatique des articles comme « lus », etc.

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Philippe Huysmans

Webmaster du Vilain Petit Canard, citoyen de nationalité belge, marié et père de deux enfants. Je vis en Belgique et j’exerce la profession d’Informaticien à Bruxelles. Mes articles